Comment Copenhague inclut-elle la gestion des eaux dans sa transition écologique?

Copenhague s’est fixé pour objectif ambitieux de devenir la première ville au monde à atteindre la neutralité carbone d’ici 2025. Si elle réussit à atteindre ce but, elle se positionnera comme une ville pionnière dans la lutte contre le changement climatique.

Le 2 juillet 2011, l’Institut Météorologique du Danemark (DMI) enregistre les précipitations les plus violentes qui aient eu lieu depuis 55 ans, avec certaines zones où il s’est déversé plus de 50 millimètres en une demi-heure seulement.1 Ces averses sont à l’origine de dégâts estimés à plusieurs centaines de millions d’euros. Depuis ce jour, la gestion des eaux pluviales est également devenue un enjeu crucial pour la ville. La fréquence accrue des événements climatiques extrêmes expose Copenhague à des risques d’inondation, ce qui nécessite une gestion durable des eaux prenant en compte les aspects écologiques, sociaux et financiers. Cet article se concentrera sur les innovations mises en place à Copenhague pour faire face à cette problématique et maintenir un développement économique et social durable.

Photo prise après les averses du 2 juillet 2011 par Anne Christine Imer Eskildsen

Les pluies violentes de juillet 2011 ont démontré que l’imperméabilité de l’aménagement urbain et la capacité insuffisante du réseau d’égouts de Copenhague étaient la source primaire des inondations. La commune n’avait encore jamais connu de pluies aussi dévastatrices et n’était aucunement prête à des dégâts aussi importants. L’objectif était alors clair: réinventer la gestion des eaux pour éviter qu’un épisode d’une telle ampleur se répète.

En 2012, la commune de Copenhague, en collaboration avec HOFOR (Compagnie semi-privée d’approvisionnement en eau et en gaz) et l’administration Technique et Environnementale (Teknik- og Miljøforvaltningen) ont formé un comité pour élaborer un plan de protection contre les dégâts provoqués par les trombes d’eau. Selon le bilan de l’adaptation climatique de 2022, ce plan, dont la fin des travaux est prévue pour 2036, repose sur une combinaison d’aménagements de surfaces et souterrains avec deux ambitions précises: la protection contre les pluies diluviennes et l’adaptation climatique.2

La première intuition était évidemment d’augmenter la capacité des égouts pour une meilleure évacuation de l’eau. Cependant, cela représente un investissement coûteux et qui n’assure pas forcément la ville si celle-ci devait faire face à des pluies encore plus importantes. Le comité a opté pour une approche plus durable, mettant en place plus de 300 projets, comprenant l’aménagement d’espaces verts et de parcs en bassins temporaires naturels en cas d’inondation et la transformation d’espaces imperméables en zones vertes plus aptes à absorber l’eau.

Des innovations à l’image de la gestion durable des eaux

Comme on l’a évoqué précédemment, une des principales innovations est d’instaurer des aménagements à la surface plutôt que d’étendre le réseau d’égouts. Ces aménagements appelés “Facilités d’évacuation locale des eaux pluviales” (LAR anlæg) représentent en 2022 plus de 50% des projets en cours pour la protection de la ville face aux eaux pluviales. Le principe est de créer ou d’adapter des espaces avec des surfaces perméables qui sont en mesure de stocker l’eau pour retarder un déversement trop important vers les égouts. En plus d’être une solution économique, cette stratégie a l’avantage d’être écologique. Elle offre en effet une multitude d’espaces récréatifs verts, qui par ailleurs améliorent la diversité de la faune et la flore au sein de la ville.

Ces aménagements sont réalisés de manières différentes, que ce soit dans les parcs ou le long des pistes cyclables avec des bandes vertes.

À une échelle plus petite, la capitale danoise fait également usage de nouvelles technologies comme les “klimafliser” ou dalles climatiques en français. Cette technologie a été introduite par Tredje Natur, une entreprise d’architecture et d’urbanisme danoise qui propose des projets urbains durables. Les “klimafliser”sont une réinvention du trottoir classique avec des dalles perméables où l’eau est récupérée pour être soit dirigée vers les égouts, soit pour être utilisée pour l’irrigation et l’arrosage de jardins et de potagers.

La question de la gestion des eaux est prise en compte également au niveau de l’architecture avec l’instauration de toits verts sur de nombreuses nouvelles constructions. Le fait d’introduire de la végétation sur les toits de la ville permet de réduire l’effet d’îlot de chaleur urbain et contribue à une augmentation de la biodiversité urbaine. En effet, ce type de toits absorbe

nettement moins de chaleur que les toits classiques et rafraîchissent leur environnement par l’évaporation de l’eau absorbée pendant les averses.

Le parc de Enghave, comment peut-on réinventer nos espaces verts?

Le quartier de Vesterbro a été particulièrement touché par les inondations de 2011, et a subi un grand nombre de dégâts. Pour cette raison, la commune a réagi rapidement, notamment par l’aménagement du parc de Enghave en amont du quartier.

Le projet a commencé en 2014 et s’est terminé en décembre 2019. Le but était de créer un parc “climatique”, qui peut répondre aux enjeux climatiques tout en créant un espace vert et accessible pour les habitants de la ville. C’est aujourd’hui un des plus gros projets de protection de la ville avec une capacité de stockage d’eau maximale de 22.600 𝑚3. Le parc est situé en aval du quartier de Carlsberg et toute l’eau qui tombe découle donc directement vers le parc. Cet espace a été imaginé pour faire face à un événement comme celui de 2011 où le parc serait entièrement submergé, grâce aux murets construits tout autour. Lors de pluies “décennales”, il serait encore utilisable par les habitants avec l’utilisation de l’eau comme un élément esthétique. Lors de pluies quotidiennes, le parc peut stocker jusqu’à 2.000 𝑚3 d’ eau récupérée des toits de Carlsberg dans un bassin souterrain. Lors de pluies plus importantes, l’eau s’amasse dans des bassins habituellement utilisés comme aires de jeu ou d’espace vert. Bien que ce parc ait été réaménagé essentiellement pour stocker l’eau de pluie, le projet comprend également l’implantation de nouvelles espèces d’arbres, de plantes et de fleurs pour assurer une biodiversité importante et un espace plaisant pour les visiteurs.

Visualisations du Park de Enghave avant et après de fortes averses

Une planification ambitieuse qui a des limites

La commune de Copenhague a su s’engager pour inclure la gestion des eaux pluviales dans sa transition écologique par ses innovations. Néanmoins, il est encore tôt pour dire que ces innovations et cette planification sont efficaces. Malgré les objectifs fixés, le plan de 2015 ne cesse d’être modifié pour plusieurs raisons. Premièrement, la mise en place d’un plan à une échelle si grande est compliquée car tous les quartiers ne présentent pas le même niveau de vulnérabilité face aux inondations. Les services proposés varient donc selon les quartiers. D’autre part, certains espaces présentent trop de contraintes pour des aménagements de surface, ce qui signifie que l’extension du réseau d’égouts est parfois la seule solution et cela impacte le budget qui ne cesse d’être modifié. Enfin, la planification de Copenhague présente plusieurs centaines de projets prévus pour 2036, impliquant déjà de nombreuses zones de constructions qui peuvent durer plusieurs années et qui perturbent la circulation et la vie au sein de la capitale.


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Christine BORDIN, Fondatrice et directrice de NORDIC INSITE

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